Parabole du développement personnel
Le développement personnel revêt différentes formes, différents niveaux. En voici déjà deux.
Parfois, il s’agit d’obtenir un peu plus de ce que nous avons en peu de quantité aujourd’hui : être un peu plus performant, dans tel ou tel domaine de sa vie, être un peu plus heureux, être moins stressé, avoir un peu plus confiance en soi, parler en public, etc. En somme, il s’agit ici « d’avoir un peu plus ou un peu moins » de quelque chose (un compétence, une méthode, des outils, etc.).
Parfois, il peut aussi être question d’autre chose. D’un autre niveau de développement personnel. Non plus seulement « d’avoir », mais « d’être ». Autrement dit, d’une volonté d’une profonde transformation, radicale, vers sa vraie nature.
Si ce dernier chemin (souvent long) nous offre la possibilité de nous établir au creux de notre Coeur, il nous propose pour cela de nous examiner, avec bienveillance et exigence. Examiner, par notre propre expérience, chaque jour, au présent, dans chaque situation (joyeuse ou douloureuse), nos conditionnements, nos mécanismes, nos émotions, notre regard sur l’autre, notre regard sur nous-même, etc. Sans rien laisser de côté, voir tout cet agglomérat auquel nous nous sommes identifiés. Le voir.. pour « voir la supercherie », pour sentir et accueillir dans son ventre que ce que nous avons pris pour être nous-même serait en fait un grand voile recouvrant, voire étouffant, la flamme de notre vraie nature… que nous commençons alors à entrevoir.
Pour illustrer ces propos sur le développement personnel, voici une parabole, récitée par Arnaud Desjardins dans son ouvrage « A la recherche du soi, III ».
Parabole du développement personnel
Cette histoire bien ancienne dit qu’un jour un tigre qui faisait des incursions dans un village et décimait les troupeaux avait été tué et un petit bébé tigre inoffensif, affolé, était venu gémir au milieu des moutons du troupeau et avait commencé à téter une brebis.
Comme ce bébé tigre était amusant, le berger l’avait gardé. Et voilà que ce petit fauve, encore à la mamelle, apprend à vivre au milieu des moutons.
Quand les chiens aboient, quand le berger fait la grosse voix, il prend peur.
Entendant bêler du matin au soir, il s’exerce de son mieux à faire « mêe » et, voyant tous les autres animaux brouter de l’herbe, il n’a pas idée de manger autre chose que de l’herbe.
Cela ne fait certainement pas un tigre heureux -parce que cette nourriture et ce mode de vie ne lui conviennent pas- mais cela fait un tigre qui n’a jamais vu que des moutons.
L’histoire suppose qu’il ne regarde pas très attentivement ses pattes et, comme il n’a pas de miroir pour contempler sa face, il en arrive à croire qu’il est un mouton parmi les autres.
Tous les soirs il se précipite avec les autres brebis pour entrer dans la bergerie et tous les matins il court avec les autres brebis pour brouter dans le pré.
Un beau jour, il y a une certaine tension chez les villageois et chez les bergers des environs parce que, dans ce village à la limite de la jungle, on a signalé qu’un nouveau tigre était venu rôder.
Les chiens aboient, les bergers se groupent, allument des feux. Le fauve vient attaquer le troupeau mais, à sa grande surprise, il voit, au milieu de tous les moutons, un bébé tigre.
Il renonce à cette idée de dévorer quelques brebis et il décide de récupérer ce jeune tigre et de le ramener avec lui dans la forêt.
Mais, en sentant la frayeur des autres moutons et la nervosité des bergers, le petit tigre est affolé devant cette énorme bête et il se précipite en gémissant avec tous les autres moutons.
Il essaie de s’enfuir mais le tigre bondit, attrape le petit tigre et l’emporte dans sa gueule, hurlant, gémissant, terrifié, arraché au seul monde qu’il connaissait, celui des bergers, des bergeries et des troupeaux.
Une fois dans la forêt le tigre essaie de convaincre ce faux mouton de sa véritable nature et de son véritable destin.
Le petit continue à trembler de peur. Alors le grand tigre l’amène au bord d’une rivière, l’oblige à se regarder dans l’eau et le petit animal a deux fois plus peur parce que, dans l’eau, il voit deux tigres au lieu d’un.
Il se regarde lui-même plus attentivement et il se demande : « Qu’est-ce que c’est ? Dans l’eau je vois bien le grand tigre mais, au lieu de voir un mouton comme tous ceux que j’ai vus depuis que j’ouvre les yeux, je vois un autre tigre. »
Alors il cherche à comprendre. « Qui suis-je ? » Il se regarde un peu plus attentivement qu’il ne l’avait fait jusque-là. Il voit qu’il a des pattes rayées de noir, et déjà sa mémoire de mouton, son expérience de mouton, son mental de mouton commencent à vaciller.
Le tigre l’emmène dans sa tanière et lui propose de manger de la viande. Le petit est d’abord horrifié, inquiet, ce n’est pas l’herbe qu’il a l’habitude de brouter.
Mais, peu à peu, il passe au-delà de sa répugnance, parce qu’à travers sa peur pour cet énorme tigre qui l’a capturé, il éprouve aussi une attraction. Il commence à essayer de manger un peu de viande.
Et, tout d’un coup, sa véritable nature se réveille, se révèle et il commence à manger cette viande à belles dents, à découvrir un goût qui, loin de lui déplaire, fait vibrer en lui son instinct profond.
Il dévore toute cette viande et, pour montrer sa satisfaction, il essaie un petit bêlement.
À cet instant, le grand tigre pousse le même rugissement que celui qui avait tellement terrifié tous les moutons.
Le petit tigre, au lieu de prendre peur, sent en lui l’écho de ce cri et, avec encore un peu de goût de viande dans la bouche, il pousse lui aussi son premier rugissement.
Voilà pourquoi on rapporte comme une sentence zen : « Le mouton bêlant s’est transformé en tigre rugissant. »
On ne change pas un véritable mouton en tigre. On change en tigre rugissant un bébé-tigre qui se prenait pour un mouton.
Et cette force de sommeil et d’esclavage […] a convaincu des tigres glorieux qu’ils n’étaient que des moutons effrayés.
Tous les êtres humains sont […] sont la liberté, la puissance infinie et illimitée […].
Et tous les êtres humains se prennent pour un pauvre homme nécessiteux, frustré, douloureux, vulnérable, imitant servilement les autres, influencé par une mentalité de troupeau alors que le tigre vit seul et indépendant.